Pendant la guerre 1939-1945, dans le petit village savoyard où j’habitais, mon père était passeur, c’est-à-dire qu’avec certains de ses collègues douaniers il faisait franchir clandestinement la frontière suisse à des juifs et à d’autres ; il était également agent de liaison de la Résistance, et il arrivait que des maquisards séjournent plus ou moins longtemps dans notre maison. En 1944, mon copain de classe (6 ans), un voisin avec qui je m’étais disputé, me dit : « Je sais qu’il y a des maquisards chez toi, je vais vous dénoncer. » Nous échangeâmes quelques coups. Il savait, ses parents savaient et, sans doute, la plupart des gens du village étaient au courant. Mais un silence prudent existait. Par la suite, sans lien avec ce qui précède, le village fut partiellement incendié par l’armée allemande en représailles à l’exécution d’officiers ; d’autres villages subirent le même sort. Il y eut des résistants abattus ainsi que des civils. Après la
guerre, le facteur raconta qu’il avait entendu de nombreuses explosions quand ma maison avait brûlé : c’était vrai qu’entre deux planchers des armes et des munitions avaient été secrètement stockées.
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