Réfractions, recherches et expressions anarchistes
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Entretien avec Pièces et Main-d’OEuvre
Des nanos et de leurs ennemis
Article mis en ligne le 15 juillet 2008

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Les nanotechnologies se développent et commencent à
investir notre quotidien. Si certains les présentent comme le
nouveau mythe prométhéen qui donnera tous les pouvoirs à
l’être humain, on ignore presque tout des risques pour la société et
pour l’environnement. Depuis plus de quatre ans, les simples citoyens
de Pièces et Main-d’oeuvre (PMO) décortiquent et critiquent, à travers
un site très complet1, les nanotechnologies et plus largement le projet
technologique d’un monde-machine. En 2006, PMO sortait un livre2 à
l’occasion de l’ouverture du site de MINATEC à Grenoble, « le premier
pôle européen pour les nanotechnologies ». Dans un texte très récent,
PMO récidive : « Les neurotechnologies, comme les nanotechnologies,
sont l’inverse du progrès : elles sont l’aveu d’une catastrophe. Elles ne
doivent leur expansion et leur puissance qu’à la destruction des
conditions minimales de survie. »


Réfractions :
On dit que les nanotechnologies sont les technologies à
l’échelle du nanomètre. Cela englobe tellement de domaines que la définition
perd son sens. À quelle définition vous référez-vous ? Pour vous, cette
définition a-t-elle évolué au fil des années ?

PMO : Nano signifie « nain » en grec : les nanotechnologies sont les
technologies de l’infiniment petit. Elles travaillent à l’échelle de l’atome,
du gène, du neurone. À cette échelle, elles réunissent la chimie, la
biologie, la physique pour utiliser les particularités de la matière aux tailles infinitésimales et la manipuler
pour fabriquer de nouveaux matériaux et
de nouveaux mécanismes.

Nous ne faisons pas de fixation sur le
mot nanomètre au sens littéral (soit un
milliardième de mètre) : les nanotechnologies
concernent tout ce qui se passe
entre 1 et 100 nanomètres.

En revanche, il y a un débat pertinent
entre ceux qui pensent arriver à ces
dimensions par miniaturisations successives,
par exemple les composants dans
l’industrie informatique (démarche « topdown
 »), et ceux dont l’objectif est de
« faire pousser » des structures et des
mécanismes à partir des briques
élémentaires de la matière (démarche
« bottom-up »).

Cette distinction recouvre une réalité :
les nanotechnologies existent surtout au
niveau industriel dans la fabrication de
nanomatériaux, et en informatique. Les
nanosciences ne sont pas encore sorties
des laboratoires où s’expérimentent les
outils et procédés des futures nanomachines
(nanosystèmes, nanomoteurs,
nanomuscles, nanocapteurs, etc.).
Ceci dit, il y a eu une évolution : parce
que le terme « nanotechnologies » était
trop restrictif, un nouvel acronyme a vu le
jour pour désigner les Technologies
Convergentes (c’est-à-dire celles qui
convergent à cette échelle) : NBIC, pour
Nano-Biotech-Informatique-sciences
Cognitives.

Pour vous, les nécrotechnologies4 sont
aujourd’hui « le front principal de la guerre
entre dominants et dominés : celui qui
commande tous les autres ». Comment êtesvous
arrivés à cette constatation ?
– C’est un lieu commun que le
capitalisme, ou le système technicien,
comme on voudra, ne peut subsister
qu’en se renouvelant constamment dans
ses procédés et ses productions. Ce qu’on
nomme en franglais moderne « Research
& Development ». Il est clair d’autre part
que le vaste monde a donné à ce
développement tout ce qu’il pouvait
donner, et qu’on ne découvrira pas
d’autre Amérique. En sorte que les seules
perspectives d’expansion et de
technification se situent maintenant soit
dans l’espace, soit dans la matière,
vivante ou inerte.

Les chercheurs-entrepreneurs ont
raison de dire qu’ils « changent la vie et
transforment le monde », comme ils le
faisaient déjà au début de l’ère industrielle,
et comme n’y sont jamais arrivés
ni les poètes, ni les révolutionnaires, dont
c’était pourtant l’objectif proclamé.
Chaque cycle industriel nous fait
changer de monde (vapeur, électricité,
chimie, nucléaire, et maintenant bio et
nanotechnologies). Dans celui où nous
sommes, le front marchant, la barre de
coupe (« the cutting edge »), est constitué
par ce qu’on appelle les techno-industries
du vivant, dont la caractéristique est
précisément l’invasion et la marchandisation
du vivant. L’opposition entre
dominants et dominés n’a pas varié, mais
la ligne de front passe maintenant par ces
nécrotechnologies. Celles-ci présentent
en outre la caractéristique d’être des
technologies de la domination, par le
contrôle matériel des corps et des esprits.

Ce front commande tous les autres, parce
que chaque avancée technologique
transforme mécaniquement nos vies et nos sociétés. C’est donc là qu’il faut
concentrer nos efforts d’opposition,
comme le système lui-même y concentre
ses forces offensives (capitaux, maind’oeuvre,
investissements, recherche,
communication).

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