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La leçon de Colin Ward
Francesco Codello
Article mis en ligne le 29 avril 2011
dernière modification le 29 avril 2013

par *
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L
e
11
février 2010 au soir, Colin Ward
est mort à l’hôpital
d’Ipswich, en Angleterre. Un message de sa compagne Harriet nous
l’a fait savoir rapidement,
en quelques mots émus.

La nouvelle de sa disparition s’est vite diffusée sur Internet (lui qui utilisait toujours sa vieille
machine à écrire !), et les témoignages ont afflué auprès de Harriet et de ses
fils.
Colin a été et reste pour moi un maître, une personne qui ne te révèle
jamais la vérité mais qui t’incite à la chercher en toi et dans les petites choses
du quotidien.

L’a
voir connu, l’avoir reçu comme ami est un privilège ; il laisse
un grand vide en moi et en d’autres qui l’ont connu. Colin était d’une
génération rare de ces anarchistes d’après-guerre qui ont entretenu le
flambeau de l’anarchisme et témoigné de leur choix par une vie militante,
anoblissant l’idée anarchiste par leur sensibilité et leur humanité.
Fils d’un instituteur
,
militant travailliste,
et d’une secrétair
e, Colin est né le 14 août
1924 à Wanstead, dans l’Essex. À l’école, il
n’est pas un élève particulièrement brillant,
et arrête à l’âge de 15 ans. Il trouve un
premier emploi dans une entreprise qui
construit des refuges aériens,
puis dans les
bureaux techniques de la commune d’Ilford.

C’est là qu’il découvre les injustices de la
bureaucratie dans l’allocation de logements
populaires,
dans une région où règnent la
pauvreté et la misère. Il a déjà été sensibilisé
dans sa famille : un de ses souvenirs les plus
chers est d’avoir assisté avec son père à un
Premier Mai à Hyde Park, en 1938, où a parlé
Emma Goldman

En 1942, il est appelé à l’armée ; à Glasgow, un ancien mineur, Frank Leech,
lui fait connaître les idées anarchistes et l’incite immédiatement à écrire pour
War Commentary,
périodique dirigé par Vernon Richards et Maria-Luisa
Berneri, où il publie son premier article. Quand ses obligations militaires le lui
permettent, il fréquente assidûment le groupe anarchiste local. Il se cultive
aussi en allant à la bibliothèque publique. Ce sera une constante de toute sa
vie, cohérente avec son mode de vie simple : dans la maison de Debenham
(Suffolk), où il a vécu les trente dernières années de sa vie avec Harriet, il y a
peu de livres et beaucoup de notes et de coupures de journaux, car il n’a cessé
de recourir aux services de la bibliothèque publique.

Frank Leech en prison fait une grève de la faim ; lorsque Colin va le voir en
uniforme (il n’a rien d’autre à se mettre), il est envoyé en punition aux îles
Orcades et Shetland où il restera jusqu’à la fin de la guerre.
Libéré finalement en été 1947, il rejoint à Londres la rédaction du journal
Freedom
auquel il a déjà envoyé nombre d’articles. Il y retrouve des
compagnons qui deviendront ses amis, John Hewetson, Vernon Richards,
Philip Sansom, Maria Luisa Berneri, puis George Woodcock, Herbert Read,
Alex Confort,
Geoffrey
Ostergaard, Gerald Brenan. Sa collaboration est
assidue.

Dès le début des années 1950 il se consacre à des thèmes qui lui
seront chers, le logement, l’espace urbain, le contrôle ouvrier, l’auto-orga-
nisation dans les usines,
l’auto-suffisance agricole,
la décolonisation.

Il est
particulièrement attentif, grâce à ses côtés empiriques et ouverts, à ce qui se
passe dans le monde intellectuel et signale, à un mouvement anarchiste peu
nombr
eux qui se reconstitue a
vec peine, les contributions qui peuvent
l’intéresser, notamment les développements de la recherche sociologique ou
historique, avec des auteurs comme Isaiah Berlin.

Faisant un bilan de cette période,
Colin
Ward écrit qu’il a cherché à faire
rentrer l’anarchisme dans le mouvement intellectuel, dans le champ des idées
prises au sérieux. C’est à cela qu’il s’attachera en fondant une revue mensuelle,
sans doute la plus sérieuse et la
plus intéressante de ces années-là,
Anarchy,
qu’il rédiger
a
de 1961 à
1970.

Colin la fabrique chez lui,
écrivant au début beaucoup de
textes signés de divers pseudonymes (John Ellerby, John
Schubert, Tristram Shandy) ou
anon
ymes.

Pour son biographe et
ami David Goodway, la revue
« exsude la vitalité, elle correspond
aux tendances de l’époque, elle
parle aux jeunes gens.

Elle s’occupe surtout de questions comme le logement
et les occupations de maisons, l’école, le contrôle ouvrier, le système pénal ».

Grâce à la rencontre avec Murray Bookchin, elle va aussi parler d’écologie et
de technologies appropriées.
Tout cela à la lumière d’une nouvelle culture
libertaire, intégrant les réflexions scientifiques, sociologiques et philosophiques
contemporaines et renouvelant les anciennes spéculations anarchistes.

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